Luc Sévigny, psychologue

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NOS INSOMNIES

Quelques outils concrets

Régulièrement, au cours de notre pratique, on nous fait part de difficultés de sommeil. Difficulté à s’endormir. Difficulté à retrouver le sommeil au milieu de la nuit. Nous avons pensé mettre en ligne quelques outils qui peuvent aider à trouver ou à retrouver le sommeil. Un texte court et pratique. Les outils les plus courants.

Pour différentes raisons, nous pouvons vivre des difficultés de sommeil plus ou moins intensément, plus ou moins fréquemment. Le sommeil, avec l’alimentation et la respiration font partie des avenues principales par où le corps humain peut se régénérer. Une dette de sommeil peut entraîner rapidement des conséquences au niveau des humeurs et/ou de l’anxiété, ou nous faire ressentir les fragilités de certains de nos schémas de base par exemple.

Préparer notre sommeil

Commençons donc par le commencement. Il faut premièrement préparer notre sommeil , c’est-à-dire ne pas passer d’une activité stimulante pour le cerveau à la position horizontale en espérant dormir tout de suite. Si vous avez des difficultés de sommeil, prévoyez une heure de préparation avant d’éteindre les lumières pour dormir.

 

 

Concrètement, lorsque nous parlons de préparation au sommeil, de quoi parlons nous ?

  • Enfiler le pyjama ou la robe de nuit (le corps associe un vêtement en particulier avec l’expérience du sommeil);
  • Éteindre l’ordinateur au moins une heure avant d’aller au lit;
  • Ne pas avoir d’activité stimulante physiquement ou intellectuellement durant cette heure (faire du ménage, lire un livre stimulant, faire de l’entraînement physique, etc.);
  • Lire un magasine ou un roman dont l’histoire est simple et non stimulante et dont vous pouvez visualiser les images mentalement (comme un film dans votre tête). Ne pas lire de livre portant sur votre travail, sur la psychologie, une intrigue policière qu’on essaie de résoudre en même temps qu’on la lit, etc. Il est recommandé de ne pas faire de lecture au lit, avant de se coucher, afin que le cerveau définisse bien que le lit est l’endroit pour dormir. Il est recommandé de lire à un autre endroit et de venir se coucher lorsque l’on sent que nos paupières commencent à tomber.
  • Défense de regarder le téléjournal de fin de soirée avant d’aller au lit! Sachant que le cerveau ne fait pas la différence entre la réalité et la non-réalité, le cerveau ira se coucher en apportant avec lui toutes ces images préoccupantes de chute boursière, de printemps arabe, d’attentats terroristes, etc.
  • Circonscrire vos heures de sommeil. Cela veut dire que vous allez vous coucher par exemple à 23hres et vous lever avec le cadran à 6hres si vous savez avoir besoin de sept heures de sommeil par nuit. Même si vous vous endormez à 22hres, essayez de résister à l’envie de vous coucher.  Couchez vous à 23h et mettez le cadran pour 6hres.
  • Résistez  à la tentation de faire une sieste dans la journée. Si vous avez des difficultés de sommeil, cette sieste risque fort d’hypothéquer votre prochaine nuit de sommeil.
  • Une fois au lit …

    Voici quelques outils, ou quelques trucs (très) concrets qui peuvent aider à s’endormir. Des outils qui sont parfois sur le mode visuel (visualisation), parfois auditif (se parler mentalement), parfois kinesthésique (utiliser nos différents sens) et même parfois des outils d’auto-hypnose de base comme l’auto-induction paradoxale (faire croire quelque chose à notre cerveau en lui donnant comme consigne le contraire de ce qu’on veut qu’il ressente ou fasse…Il ne faut pas que je m’endorme…). Mais allons-y par étape. Un exemple à la fois, une étape à la fois.

    … la respiration…

    Le premier outil par lequel nous commencerons est peut-être le plus attendu de tous : la respiration. Couché dans votre lit, sur le dos, vous portez votre attention sur votre respiration. Vous suivez votre respiration, sans y changer quoi que ce soit. Si vous constatez que votre respiration est plutôt haute, vous essayer de la descendre et de respirer par le ventre. Prenez le temps. Ne vous pressez pas. Ne vous bousculez pas. Si après une dizaine de respiration, vous n’y parvenez pas, posez une de vos mains à plat sur votre ventre (ou un oreiller). En posant simplement une main à plat sur votre ventre, c’est comme si cela montrait à votre corps où il devait respirer. Ça lui montre le chemin. Si, après une vingtaine de respirations, vous avez toujours des difficultés à respirer par le ventre, laissez votre main (ou l’oreiller) sur votre ventre et continuez l’exercice en vous satisfaisant d’une respiration plus haute. Ne vous acharnez pas. Ne vous faites pas vivre d’irritation, de colère, ou quelqu’émotion de cette famille d’émotions. Cela risquerait de faire augmenter votre stress, votre anxiété de performance. De toute façon, quelque soit votre respiration, basse ou plus ou moins basse, appliquez vous à simplement en ressentir les bienfaits. Portez votre attention sur l’air qui entre et qui sort. Portez votre attention à vos narines. Portez votre attention à vos poumons. Portez votre attention au massage que la respiration fait à vos organes internes (ventre, estomac, foi, intestin, etc.). Simplement goûter le moment présent et … respirer … Il est possible que ce simple exercice de respiration amène le sommeil. Portez votre attention sur le massage des organes internes qu’elle vous apporte. Si ce n’est pas le cas, n’oubliez pas un principe important qui vaut pour tous les exercices portant sur le sommeil : PERSÉVÉREZ. Ne laissez pas tomber après 5 ou 6 respirations en vous disant que ça ne fonctionne pas et en abandonnant. Non ! Persévérez. Centrez vous sur votre respiration et sur le massage que votre respiration procure à votre abdomen.

    … des outils kinesthésiques …

    Toujours en respirant, portez votre attention sur l’ensemble de votre corps. Qu’il n’y ait pas de tension nulle part (coudes, genoux, bassin, mâchoire, etc.). Si vous ressentez des tensions, vous les détendez les unes après les autres. Lentement. Tout simplement. Vous pouvez faire cette étape en portant votre attention à chacune des parties de votre corps. En commençant par le cuir chevelu et en descendant jusqu’aux orteils. Lentement. Tout en respirant d’une respiration basse (ou plutôt basse), vous observez chacune des parties de votre corps qui se détendent. Une après l’autre. Lentement. Comme si vous vous baladiez dans un jardin et que vous observiez les plantes et les fleurs. À gauche. À droite. Lentement. Chaque partie du corps. En respirant.

    Tout en respirant et tout en étant conscient et heureux que votre corps soit aussi détendu, vous portez votre attention sur vos différents sens. Commencez premièrement pas l’ouïe et profitez des sons et/ou du silence qui vous entoure. Tout en respirant… vous écoutez et vous vous dites comme c’est bon d’être ici et maintenant et de profiter du moment présent … de ces sons … de ce silence …. Après une vingtaine de respirations, vous portez ensuite votre attention sur votre odorat et vous profitez du moment présent en vous disant qu’il est bon d’être ici et maintenant et de profiter de ce moment … de ces odeurs … de l’odeur de l’air …. Prenez le temps de bien humer l’air ambiant et d’y prendre plaisir. Tout en respirant, vous portez votre attention sur votre peau et profitez, appréciez la sensation de l’air sur votre visage ou sur vos bras, des draps sur votre corps, de l’oreiller sous votre tête. Qu’il est bon d’être ici et maintenant …. Respirez … Vous pouvez faire des aller-retour entre ce que vous entendez, ce que vous humez et ce que votre peau ressent. Lentement. Toujours en respirant lentement.

    … la visualisation …

    Toujours en respirant, en étant conscient de la détente de votre corps et en profitant du moment présent par toutes vos sensations corporelles (massage des organes internes, l’ouïe, l’odorat, le toucher), vous allez visualiser un tableau noir (noir, vert ou blanc…) et vous voyez sur ce tableau toutes vos pensées qui y sont écrites. Comme ce tableau est chargé d’écriture ! Partout. Jusque dans les coins. Vous prenez alors l’efface ou le chiffon qui se trouve à côté et vous effacez toutes vos pensées qui y sont écrites. Lentement. Minutieusement. En prenant bien soin de tout effacer jusque dans les coins du tableau. Ressentez le bienfait, la légèreté, l’apaisement.

    Si l’exercice de visualisation utilisant le tableau ne vous convient pas, vous pouvez visualiser autre chose. Par exemple, vous pouvez visualiser un mur tout sale , couvert de taches que vous allez peindre au rouleau. En faisant très attention de ne pas dépasser. Peindre lentement toute la surface en appliquant bien la peinture. Que la peinture aie la même (ou à peu près…) épaisseur partout pour que le résultat soit uniforme. Portez votre attention sur les contours pour ne pas accrocher le plafond ou les murs de côtés ou le plancher. Utiliser la visualisation qui vous convient. Mais allez-y lentement, en respirant.

    Vous continuez à respirer, à vous détendre, à ressentir votre corps et à visualiser. Si vous préférez, ne portez votre attention que sur un de ces trois aspect de l’exercice. Allez-y ! Utilisez ce qui vous convient le mieux. N’essayez surtout pas de performer…

    … et une induction paradoxale …

    Si vous êtes toujours éveillée, vous continuez à respirez par le ventre, à être présent à vos sens et vous vous dites mentalement, lentement, comment il est bon d’être éveillé. De profiter du moment présent…

    Comme il est bon d’être éveillé … (lentement)… de sentir l’air sur ma peau, sur mon visage, sur mes bras … (lentement)… d’entendre les sons ou le silence … (lentement)… de sentir les draps sur mon corps, sur ma peau … de sentir l’air frais qui entre par mes narines et jusque dans mes poumons … le massage que ma respiration basse m’apporte … (lentement)… plutôt que de résister à l’expérience d’être éveillé, je vais en profiter … (lentement)… pendant que tout le monde dort … profiter de ce moment unique, magique … ce moment est tellement bon que plutôt que d’essayer de dormir, je vais essayer de rester éveillé pendant une quinzaine de minutes … quinze minutes magiques … à profiter du moment … respirer par le ventre … écouter les sons ou le silence … sentir l’air et les draps sur ma peau … et demeurer éveillé …

    Il est ici question d’induction paradoxale. Si vous êtes toujours éveillé, votre cerveau s’attend à une séquence qui pourrait ressembler à je suis éveillé. Je vais demeuré éveillé. Je vais être encore épuisé demain toute la journée. Je vais me choquer. Je vais me faire vivre de l’irritation, de la colère…. etc.   Je vais essayer d’éviter cette étape d’irritation qui fera en sorte que mon corps, mon cerveau sécréterait de l’adrénaline et du cortisol. Plutôt que de me faire vivre cette colère qui me ferait sécréter ces hormones, je vais dire à mon cerveau qu’il est heureux, qu’il est tellement bien qu’il veut demeurer éveiller, profiter du moment présent, respirer… Je vais ainsi essayer de casser cette séquence toxique à laquelle il s’attend et de lui faire sécréter des endorphines.

    Essayez ! Vous verrez !

    Continuez cette expérience. Et n’oubliez pas, un outil, une attitude très importante dans ce type d’expérience est LA PERSÉVÉRANCE . N’arrêtez pas de respirer, ne choisissez pas de vous dire que ça ne fonctionne pas et de retourner à vos tensions. Persévérez. Continuez à respirer. Lentement. Ralentissez vos pensées. Ralentissez votre expérience. Persévérez…

    Cet exercice, ce type d’exercice peut être utilisé au coucher tout comme au milieu de la nuit alors que vous vous réveillez et souhaitez retrouver le sommeil.

    Évidemment, cet exercice, ce texte ne présente que quelques outils qui peuvent servir de support à la personne qui a des difficultés avec son sommeil et qui cherche une aide rapide. Simplifiée. Si vous êtes intéressé à explorer et à lire davantage sur l’insomnie, je vous recommande le très bon livre de Charles M. Morin (2009), Vaincre les ennemis du sommeil , publié aux éditions de l’homme.

    Sur ce, bonne nuit … j’ai un tableau à effacer …

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